Au cours des neuf premiers mois de l’année 2020, les exportations du secteur chimique et pharmaceutique vers le Royaume-Uni ont chuté de 23 %, se chiffrant à 4,6 milliards d’euros. L’impact économique du Brexit se fait donc déjà clairement ressentir. En 2019, les exportations du secteur vers le Royaume-Uni avaient déjà diminué de 10 %. C’est ce que révèle une analyse d’essenscia, la fédération sectorielle belge de la chimie et des sciences de la vie, basée sur les chiffres de la Banque nationale.
Depuis le 1er janvier, le Brexit est devenu une réalité. Le Royaume-Uni ne fait désormais plus partie de l’Union Européenne. Grâce à l’accord commercial conclu in extremis et entré provisoirement en vigueur le jour de l’an, nous avons évité le pire scénario d’un Brexit ‘no-deal’ qui aurait entrainé des taxes à l’importation. L’impact économique du Brexit pour le secteur chimique et pharmaceutique – le secteur d’exportation le plus important du pays, représentant un tiers des exportations totales de la Belgique – est néanmoins déjà considérable.
Diminution des exportations de produits chimiques et pharmaceutiques supérieure à la moyenne
En 2019, les exportations du secteur chimique et pharmaceutique vers le Royaume-Uni étaient déjà en baisse de 10 % par rapport à l’année précédente. De janvier à septembre 2020, cette tendance négative s’est poursuivie. On constate ainsi une forte diminution de 23 % par rapport aux neuf premiers mois de 2019. En comparaison, le total des exportations belges vers le Royaume-Uni n’a diminué ‘que’ de 16 % à la même période l’année dernière. La baisse des exportations de produits chimiques et pharmaceutiques est donc beaucoup plus importante que la moyenne.
En 2015, l’année précédant le référendum du Brexit, le Royaume-Uni en tant que voisin et partenaire commercial historiquement important représentait encore 7,5 % des exportations totales du secteur chimie et pharma. L’année dernière, cette part des exportations sectorielles n’atteignait plus que 4,7 %. Les produits chimiques et pharmaceutiques représentent toujours 23,8 % de l’ensemble des exportations belges vers le Royaume-Uni mais en 2015, ce pourcentage était encore de 28 %. La baisse des exportations se fait sentir dans toutes les catégories du secteur, tant dans l’industrie pharmaceutique (-29%) que dans celle des matières plastiques (-23%) et des produits chimiques (-22%).
Augmentation des importations due aux vaccins contre le coronavirus
Du côté des importations, on constate également une diminution de 20 à 25 % pour les matières plastiques et les produits chimiques, ce qui correspond à la baisse des autres secteurs. En revanche, les importations de produits pharmaceutiques, en particulier de vaccins, ont plus que doublé au cours des neuf premiers mois de l’année dernière. Cela est principalement dû à la position de notre pays en tant que plaque tournante internationale dans le développement et la distribution des vaccins contre le coronavirus. Environ 60 % de l’ensemble des exportations de vaccins du Royaume-Uni avaient pour destination la Belgique, tandis que la part des États-Unis a fortement diminué, passant de 65 % à 12 %.
Des coûts plus élevés en raison de la charge administrative
L’impact négatif du Brexit pour le secteur de la chimie et des sciences de la vie est également perceptible au niveau administratif : contrôles douaniers supplémentaires et donc risque accru de retards dans le processus logistique, complexité supplémentaire dans l’application des règles d’origine, et surtout un doublement des procédures administratives et des coûts d’enregistrement associés en matière de législation sur les produits.
Depuis le 1er janvier, il existe deux systèmes d’enregistrement REACH distincts dûs au Brexit : EU REACH et UK REACH. La législation REACH sur les produits chimiques est un règlement européen qui régit l’enregistrement, l’autorisation de mise sur le marché et l’utilisation des substances chimiques en toute sécurité. L’Union européenne et le Royaume-Uni ne se sont pas mis d’accord sur un échange fluide de données dans le cadre de REACH pour reconnaître réciproquement les enregistrements et les données scientifiques existants. Il s’agit d’une occasion manquée. Le nouveau double système compliquera, au moins dans un premier temps, l’importation et l’exportation de produits chimiques pour les fabricants, les distributeurs et les utilisateurs industriels.
“Dans l’intérêt de la prospérité du pays, nous devons donc continuer à œuvrer en faveur d’accords commerciaux ambitieux et s’opposer aux obstacles allant à l’encontre du système de libre-échange”
Yves Verschueren, administrateur délégué d’essenscia
Yves Verschueren, administrateur délégué d’essenscia : « La crise du coronavirus et le Brexit affectent largement les résultats économiques des entreprises chimiques et pharmaceutiques. Cela démontre une fois de plus l’importance des exportations et du commerce international pour une économie ouverte comme celle de la Belgique. Le Brexit met également en évidence à quel point notre position concurrentielle internationale est vulnérable. Dans l’intérêt de la prospérité du pays, nous devons donc continuer à œuvrer en faveur d’accords commerciaux ambitieux et s’opposer aux obstacles allant à l’encontre du système de libre-échange, afin que l’économie belge, chimie et pharma en tête, puisse continuer à jouer son rôle d’exportateur mondial. »