L’économie a un rôle crucial à jouer dans la sortie de crise. Une industrie forte orientée vers l’exportation, le commerce international et les investissements dans les infrastructures du futur : les points sur les i de l’économie. Une opinion d’Yves Verschueren, administrateur délégué d’essenscia.
Notre société est confrontée à l’important défi de permettre, grâce à des mesures adaptées, un redémarrage réfléchi et, surtout sûr de l’économie. Ce n’est pas un exercice facile mais de nombreuses entreprises des secteurs cruciaux, tels que l’alimentaire, la pharmacie et la chimie, démontrent depuis de nombreuses semaines que cela est possible. Ces secteurs se sont adaptés pour maintenir leur production très souvent essentielle, dans le respect de la sécurité de leurs travailleurs, des règles d’hygiène strictes et des distanciations sociales.
« Pour sortir de cette crise, nous avons besoin d’un triple saut économique »
Yves Verschueren, administrateur délégué d’essenscia
L’impact économique de la crise du coronavirus est sans précédent mais l’économie est également le meilleur remède pour empêcher notre société de s’essouffler davantage et de mettre en péril notre prospérité future. Pour sortir de cette crise, nous avons besoin d’un triple saut économique, d’une reprise de l’activité en trois phases. En effet, la sécurité sociale et les soins de santé de qualité ne sont pas envisageables sans les fondements financiers d’une économie forte. Tout comme il n’existerait pas de médicaments, d’équipements médicaux, d’énergie, de nourriture ni d’eau potable sans une industrie locale fortement ancrée.
La première phase, en cours actuellement grâce aux systèmes de chômage temporaire et de mesures de soutien du gouvernement, consiste à éviter les faillites et le chômage structurel. Il s’agit d’un airbag solide pour amortir les premiers chocs économiques. Nous évitons ainsi d’endommager dans l’immédiat la solidité financière des entreprises et le pouvoir d’achat des familles, mais cette solution reste temporaire et n’est pas un dispositif de sauvetage structurel.
La deuxième étape nécessaire est le redémarrage progressif de l’économie. La santé et l’économie vont de pair. La crise du coronavirus démontre que la Belgique et l’Europe ont besoin d’un ancrage industriel solide afin de créer de la prospérité de manière durable. L’industrie, qui produit des matériaux à haute valeur ajoutée et importants pour la société a, une fois de plus, prouvé sa valeur en tant que pilier essentiel de l’économie.
« Nous devons remettre l’économie sur les rails, avec une industrie orientée vers l’exportation comme moteur »
Jetons un regard critique sur la production essentielle que nous devons ancrer en Europe, afin de gagner en autonomie dans les maillons vitaux de certaines chaines de valeur. Nous avons besoin d’un marché unique européen fort et de solidarité entre les États membres. Nous ne devons pas compter uniquement sur nous-mêmes, et devons continuer à rechercher des accords commerciaux équitables avec d’autres parties du monde. Le libre-échange international est un axe économique vital, en particulier pour un pays exportateur comme la Belgique. Nous devons donc remettre l’économie sur les rails, avec comme moteur une industrie orientée vers l’exportation.
Enfin, dès que l’économie tournera à nouveau à plein régime, nous devrons oser faire le grand saut en investissant dans l’infrastructure logistique, dans les réseaux énergétiques du futur et la technologie digitale comme la 5G. Nous devrons également continuer à encourager fiscalement les investissements dans l’innovation. Nous devrons renforcer davantage la compétitivité internationale de notre économie ouverte et garantir un climat d’investissement attrayant qui suscite des investissements stratégiques dans notre pays et à l’étranger avec, à la clé, des emplois, une expertise technologique et de la prospérité.
Pour visualiser les différents scénarios de crise économique, nous avons déjà passé en revue de nombreuses lettres de l’alphabet : la courbe optimiste en V, la vague en W ou le graphique en L d’une récession prolongée. Le scénario d’horreur absolu prend la forme du I, soit une forte baisse sans perspective de reprise.
« C’est en mettant littéralement les points sur les i de l’économie – grâce à l’industrie, l’internationalisation et l’investissement – que la relance économique a le plus de chances de réussite »
Cependant, c’est en mettant littéralement les points sur les i de l’économie – grâce à l’industrie, l’internationalisation et l’investissement – que la relance économique a le plus de chances de réussite. Nous ne devons pas nous replier dans une restriction budgétaire ou protectionniste, mais nous devons tirer les leçons de cette crise du coronavirus pour renforcer davantage la collaboration entre les maillons cruciaux des chaines de valeur logistiques et industrielles qui ont maintenu notre pays et l’Europe à flot ces dernières semaines.
Le triple saut est une discipline très technique en athlétisme, qui nécessite un rapport optimal entre les 3 éléments. Il s’agit de trouver le juste équilibre, au risque de perdre en vitesse et en puissance de saut. Cette métaphore illustre parfaitement le défi auquel notre société et les décideurs politiques sont confrontés. Nous devrons tous faire preuve d’endurance et de ténacité mais ne pas sauter n’est pas une option.